De la Tenue, par Jean Raspail

Hommage à M. Jean Raspail qui vient de nous quitter

De la Tenue

S’il existe en français, pour s’adresser à autrui, deux pronoms personnels de la deuxième personne, l’un au singulier, TU, l’autre où pluriel, VOUS, appelé pluriel de politesse, c’est que notre langue se plaît à certaines nuances qui sont les bases de la civilité. Il ne s’agit pas là de code, de formalisme de classe, de snobisme, de règles mondaines, mais simplement d’usages naturels, qui se perdent et qui faisaient, entre autres, le charme et l’équilibre de la France et le plaisir d’être Français.

Ce plaisir-là s’émousse. On me dira que d’autres motifs plus graves et plus irritants y concourent, d’autres lésions de civilisation, et que c’est considérer les choses par le petit bout de la lorgnette, mais dans ce seul domaine de la civilité, de petites causes peuvent entraîner de grands effets dévastateurs.

La Révolution française, jusqu’à l’avènement du Directoire, savait ce qu’elle faisait en imposant le tutoiement général et en interdisant l’emploi des vocables Monsieur et Madame qui marquaient au moins une déférence réciproque : elle égalisait au plus bas niveau, celui du plus grand dénominateur commun de la familiarité.

Aujourd’hui, ce sont d’abord nos enfants que nous voyons condamnés à être partout tutoyés, comme sous la Révolution. Je ne m’en prends point au tutoiement naturel d’affection et d’intimité (la famille, les amis), ou de solidarité (les copains, les camarades,), mais à celui que leur infligent systématiquement les adultes, comme si l’enfant n’avait pas droit au respect et à la liberté de choisir selon son cœur et ses humeurs qui a, ou qui n’a pas, le loisir de le tutoyer.

D’une façon significative, et qui ne doit rien au hasard, cela commence dès l’école, où plus un instituteur ne prend la peine de vouvoyer (ou voussoyer) un enfant. Au premier jour de classe, l’ex-maître devenu enseignant par banalisation de la fonction et refus de cette sorte de sacerdoce qu’elle représentait autrefois, ne demande plus à l’enfant dont il fait connaissance: « Comment vous appelez-vous ? », ce qui serait au moins du bon français, mais : « C’est quoi, ton nom ? »
Sans que l’enfant en ait conscience, le voilà déjà rabaissé, marqué comme un élément de troupeau. On lui eût dit « vous » d’emblée, ainsi qu’à ses camarades, qu’ils en auraient retiré, tous ensemble, l’impression d’être considérés et appelés à de grands destins, ce qui est faux, naturellement, pour la plus grande partie d’entre eux, mais représente quand même un meilleur départ dans la vie que d’être ravalés dès l’enfance au matricule du tutoiement.

Le jeune élève va être vite conditionné. Dès qu’il saura lire et écrire, ses premiers livres « d’éveil » lui poseront leurs premières questions sous la forme autoritaire du tutoiement : « Dessine ici un arbre, une vache…. » ou encore : « Ecris les noms des fleurs que tu connais… » Ce n’est pas bien méchant, mais c’est ainsi que le pli se prend.

Au catéchisme, devenu catéchèse, l’accueil en TU n’es pas différent, mais ses effets en sont plus marquants, car il s’agit de choses plus graves : c’est l’âme qui se fait tutoyer d’entrée. L’ouvrage « Pierres vivantes » qui fit couler tant d’encre à cause de certaines énormités qu’il contient, distille son enseignement par le biais d’une complicité, et non d’un magistère, que le tutoiement impose à l’enfant.
Tout cela semble si bien admis, que c’est un aspect des choses que personne, à ma connaissance n’a jusqu’à présent souligné. On pose pour principe que l’enfant s’y trouve plus à l’aise. C’est sans doute vrai eu premier degré. Cette pente-là est facile et semble toute naturelle C’est justement pourquoi l’on devrait s’en méfier…

Car dans cet immense combat de société qui divise le pays depuis déjà longtemps, et qui est loin d’être terminé, quelles que soient ses péripéties politiques, nos enfants sont un enjeu formidable : ils représentent l’avenir. Tout se tient et c’est au nom de l’égalitarisme et de l’uniformité larvée qu’on prive ainsi l’enfant de la déférence élémentaire et du respect qu’on lui doit.

Le tutoiement qui sort de la bouche d’un instituteur, fût-il de l’enseignement privé, et de la plupart de ceux qui font profession de s’occuper des enfants, est d’abord un acte politique, même s’il est inconscient. Cela fait partie du dressage, et cela donne des résultats. Déjà, une bonne partie de la France adulte, et toute la France juvénile, se tutoient, dans un grand dégoulinement de familiarité, qu’on appelle aujourd’hui la CONVIVIALITÉ, mot de cuistre, alibi de cuistre, camouflage de cuistre. De la convivialité à la vulgarité, le pas est vite franchi.

Dans de nombreux milieux du travail, le tutoiement devient un passeport obligatoire, dont on ne saurait se passer sous peine de déviationnisme bourgeois, alors que, chez les compagnons d’autrefois, c’était le vouvoiement qui marquait l’esprit de caste. De CASTE, pas de classe.

Au sein du parti communiste, comme du parti socialiste, dans la “République des camarades”, le tutoiement est de rigueur. Seul François Mitterrand y faisait exception lorsqu’il était premier secrétaire de son parti. Il détestait qu’on le tutoie, et allait jusqu’à l’interdire, ce qui montre assez bien, à mon sens, que son socialisme était seulement d’ambition et non de conviction…

Mais, pour le commun des Français, aujourd’hui, il importe de ne pas être FIER, car ce mot-là, justement, par ce qu’il entraîne de dignité et de sentiment élevés, est devenu l’un des nouveaux parias de notre vocabulaire.

Cela peut paraître sympathique, amical, empreint de simplicité. En réalité, ce n’est qu’un piège. Quand les convenances du langage tombent, l’individu perd ses défenses naturelles, rabaissé au plus bas niveau de la civilité. N’a pas d’autre but non plus la destruction de la langue française préparée dans les laboratoires subversifs de l’Education nationale, et dont on mesure déjà les effets…

Pour ma part, j’ai été dressé autrement. Je me souviens de la voix du maître qui tombait de l’estrade : «Raspail! Vous me copierez cent fois…» ou : «Raspail! Sortez!»

J’avais neuf ans. C’était juste avant la guerre, dans une école laïque de village. Plus tard, au lycée (et ce n’est pas pour rien qu’on a cassé certaines façons, là aussi), les professeurs nous donnaient naturellement du MONSIEUR sans la moindre dérision : « Monsieur Raspail, au tableau ! » On se vouvoyait entre condisciples, réservant le tutoiement à un nombre restreint de camarades choisis.

Choisir, tout est là ! Ne rien se laisser imposer sur plan des usages, ni le tutoiement d’un égal, ni à plus forte raison celui d’un supérieur.
Il y avait une exception, de ce temps-là : le scoutisme. Je me souviens de ma surprise quand je m’étais aperçu, à onze ans, qu’il me fallait tutoyer cet imposant personnage en culottes courtes qui devait bien avoir trente ans, et qui s’appelait le scoutmestre, et qu’à l’intérieur de la troupe tout le monde se tutoyait aussi avec une sorte de gravité. Mais il s’agissait là d’une coutume de caste, d’un signe de reconnaissance réservé aux seuls initiés, comme la poignée de main gauche, l’engagement sur l’honneur, et les scalps de patrouille, car le scoutisme avait alors le génie de l’originalité, une soif de singularité forcenée, dont nous n’étions pas peu fiers. On se distinguait nettement de la masse, on s’élevait par degrés à l’intérieur de cette nouvelle chevalerie, mais il fallait s’en montrer digne.

En revanche, on vouvoyait Dieu. Cela nous semblait l’évidence même. La prière scoute chantée commençait ainsi: « Seigneur Jésus, apprenez-moi à être généreux, à Vous servir comme Vous le méritez… » C’est la plus belle prière que je connaisse. Il m’arrive encore de m’en servir. Voit-on comme la musique des mots eût été différente à la seconde personne du singulier, et comme elle parlerait autrement à l’âme: « … A Te servir comme Tu le mérites. » ? C’est sec, cela n’a pas de grandeur, cela ne marque aucune distance, on dirait une formalité. Et cependant, aujourd’hui, c’est ainsi que l’on s’adresse à la Divinité, on lui applique le tutoiement le plus commun en français. Et le reste a capoté en série: la liturgie, le vocabulaire religieux, la musique sacrée, le comportement de la hiérarchie, la laïcisation du clergé, la banalisation du mystère, si l’on s’en tient aux seules lésions apparentes. Dieu est devenu membre du parti socialiste. L’usage est de le tutoyer.

Au chapitre des habitudes, ou plutôt des attitudes, j’ai conservé celle de vouvoyer aussi les enfants qui ne me sont pas familiers, et d’appeler Monsieur ou Mademoiselle les jeunes gens que je rencontre pour la première fois. La surprise passé, ils me considèrent avec beaucoup plus de sympathie, et j’ai même l’impression qu’ils m’en sont reconnaissants. Nous tenons des conversations de bien meilleure venue, et les voilà qui se mettent à surveiller leur langage, c’est-à-dire à s’exprimer correctement en français, comme si d’avoir été traités avec déférence leur donnait des obligations nouvelles et salutaires. Les négations et les liaisons réapparaissent miraculeusement dans la phrase (je n’ai pas, au lieu de j’ai pas, c’est-t-un an lieu de c’est-h-un, etc.), la prononciation se redresse (je suis pour chuis, je ne sais pas pour chais pas, etc.), le goût de l’élégance verbale ressuscite. Faites vous-même l’essai, vous verrez. La dignité du langage et la dignité de la personne se confondent le plus souvent. Voilà pourquoi l’on parle si mal en ce moment…

Oserai-je avouer ici que mes enfants me vouvoient, et vouvoient également leur mère ? Cela depuis leur plus jeune âge, et sans aucun traumatisme. Sans vouloir convertir personne à ce qui peut paraître une ostentation, là aussi il faut constater que le langage courant au sein de la famille s’en trouve naturellement affiné. Et même dans les affrontements, qui ne manquent pas, un jour ou l’autre, vers la fin de l’adolescence, d’opposer les enfants à leurs parents, le vouvoiement tempère l’insolence et préserve de bien des blessures. Il en va de même entre époux, encore que ce vouvoiement-là soi devenu aujourd’hui une sorte de curiosité ethnographique, et Dieu sait pourtant les services de toutes sortes qu’il rend. Je le pratique depuis trente-cinq ans que je suis marié. C’est un jeu divertissant, dont on ne se lasse jamais. Même dans le langage le plus routinier, l’oreille est toujours agréablement surprise. Les scènes dites de ménage, fussent-elles conduites avec vigueur, s’en trouvent haussées à du joli théâtre. On a envie de s’applaudir et de souper ensemble au champagne après le spectacle. Toutes les femmes qui ont compté dans ma vie, je les ai toujours voussoyées, et réciproquement, pour l’honneur de l’amour en quelque sorte. Puis-je espérer, sans trop, y croire, que, tombant sur cette chronique, un jeune couple s’en trouvera convaincu, au moins curieux de tenter l’expérience ? En public, ils étonneront les autres, ce qui est déjà une satisfaction en ces temps d’uniformité où se nivellent médiocrement les convenances sociales. En privé, ils s’amuseront beaucoup aux mille et une subtilités, du vous, et je prends le pari qu’ils ne rebrousseront pas chemin de sitôt.

Dans un tout autre domaine, j’assistais récemment aux obsèques d’un ami cher, Christian, de son prénom, mais il avait aussi un nom, fort joli nom d’ailleurs. Eh bien, le prêtre, qui l’avait jamais vu vivant, qui ne l’avait même jamais vu du tout, le trairait à tu et à toi, selon les piètres dispositions du nouvel office des morts : « Christian, toi qui.. Christian, toi que… Christian, Dieu te… et ta famille… » Exactement comme pour les enfants sans défense ! En vertu de quoi, au nom de quoi, la familiarité doit-elle répandre ses flots visqueux jusque sur les cercueils ? Bossuet tutoyait-il les princes en prononçant leurs oraisons funèbres ? Or chaque défunt est un roi, enfin couronné, et sacré à jamais. Quant au nom patronymique de Christian, celui sans lequel le prénom de baptême n’est rien, il ne fut pas une seule fois prononcé ! Et pourquoi pas la fosse commune obligatoire, dans la même foulée…

Car me frappe tout autant, l’emploi généralisé du prénom seul, en lieu et place du patronyme précédé on non du prénom, et cela dans toutes les circonstances de la vie où il n’est pas nécessaire de présenter une carte d’identité : « C’est quoi, ton nom? Serge. Moi, c’est Jocelyne… » Serge qui ? Jocelyne qui ? Les intéressés eux-mêmes semblent ne plus, s’en soucier. Il y a des dizaines de milliers de Serge, des dizaines de milliers de Jocelyne, alors qu’il n’existe qu’un seul Serge X., qu’une seule Jocelyne Z. Mais on se complaît dans l’anonymat. On y nage à l’aise, on s’y coule avec délices, on n’y fait pas de vague, semblable aux milliers de milliers, on n’éprouve pas le besoin de faire claquer son nom comme un drapeau et de brandir ce drapeau au dessus de la mêlée.

Qu’on se rassure, toutefois. Il nous restera au moins à chacun, le numéro matricule de la Sécurité sociale. Celui-là, on y tient.
J’en connais même qui se battront pour ça…

Jean Raspail

Nos institutions ne correspondent plus aux nécessités

Extrait de l’éditorial d’Hilaire de Crémiers, à paraître dans le numéro de janvier de Politique Magazine :

Il n’est pas de jour où des Français, des groupes de Français, ne protestent contre le carcan qui les étouffe et que le régime ne cesse de resserrer sur eux, tout en affirmant, comme pour se gausser, qu’il le fait au nom de la Liberté, de l’Egalité et, pourquoi pas, de la Fraternité.

Pourquoi les Français n’osent-ils pas voir les raisons de leur malheur ? Les institutions, telles qu’elles fonctionnent, ne correspondent plus aux nécessités du siècle. C’est le cœur du problème politique français. Qui ne le comprend ? Du sommet de l’État jusqu’à la plus petite autorité investie de la puissance publique, il faudrait, dans cette période difficile, à l’encontre de ce qui se passe aujourd’hui, des personnes qui aient d’abord et fondamentalement le sens du bien commun et que rien ne puisse, d’une manière ordinaire, les en détourner. Voilà où va sans aucun doute le vœu politique du peuple français, le vrai, celui qui travaille, qui souffre et qui aime : il devine que ce serait là le salut de la France, mais il n’a pas la capacité d’imaginer ni encore moins d’exprimer un tel souhait.

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Quelle que soit la violence de la crise, le peuple intuitivement sait qu’en un tel cas il serait rassuré et qu’il se mettrait au travail avec goût. Le fait que l’État, et tout ce qui en relève, se simplifierait par l’évidente vertu d’une décision majeure qui l’arracherait aux luttes des partis et aux idéologies, entraînerait la France dans une voie de redressement général dont chacun sent un urgent besoin ; les responsabilités seraient conférées non plus en raison de choix idéologiques et partisans, mais en fonction de l’intérêt national et du bien public. Impossible, dit-on. Dans le cadre des institutions actuelles, oui, bien sûr. Mais personne ne sait dans quel état ces institutions se trouveront demain si la dégradation de la situation continue.

[…] Tous les 1793 de l’histoire s’achèvent en anarchie qui appelle inéluctablement un retour à l’ordre. Mais les voici nos maîtres : leur visée totalitaire est absolue et dans tous les domaines, y compris familial, éducatif et religieux. Ces gens sans vergogne dictent leur loi au nom d’un Bien qu’ils définissent eux-mêmes. […]

Toutes les institutions ont été gangrenées par leur esprit de parti. C’est que leurs appareils s’en sont emparés ; ils vivent dessus, pas seulement financièrement, mais aussi médiatiquement, politiquement, même philosophiquement, car ils ont l’outrecuidance de légaliser par le biais des institutions leur misérable philosophie pour l’établir comme norme universelle. Comme dans 1984 ils réécrivent l’histoire, ils fixent le bien et le mal, ils déterminent le vrai et le faux. Ils mettent toutes les forces sociales au service de leurs lois et de leurs décrets. Ils rendent ensuite l’administration complice et, pour plus de sûreté, ils la doublent de commissions, de comités, de hauts conseils, un appareillage supplémentaire où la gabegie n’entretient que la perversité.

Fonctionnaires hauts et petits, élus sincèrement attachés à leur tâche, braves gens embringués dans des marchés de dupes, militaires de tous grades, tous ont eu cent fois l’occasion de s’en rendre compte : il y a derrière les organigrammes une machinerie et elle ne fonctionne que dans un seul sens, toujours le même. Cette constatation, chacun peut la faire. Elle ne relève pas de la théorie du complot. C’est comme ça et de plus en plus comme ça.

Des comités d’éthique aux commissions spécialisées, des rapports d’experts aux innombrables décisions prises subrepticement et tout à coup imposées sans ménagement, c’est toujours les mêmes trucs indéfiniment resservis pour balayer l’objection et amener la solution, leur solution, prévue d’avance. On croit travailler pour la France, on travaille pour des coteries qui manipulent les partis et qui s’installent dans les lieux de pouvoir. Comment ne pas être écœuré ? Même en politique extérieure le risque est de voir les engagements de la France servir à d’autres buts que le souci réel des populations, alors que la France a un rôle évident à jouer en Afrique. Mais que peuvent penser des politiciens qui n’ont jamais réfléchi à ces questions ? […]

Le régime ne fonctionne que pour lui-même, comme dans les pays en décomposition : c’est cette vérité qu’il faut comprendre. Les élections municipales et européennes agitent le marigot politique. Elles auront valeur de signe et encore ! La gauche tient si bien ce qu’elle a réussi à prendre dans les territoires qu’il y aura des surprises, mais peut-être pas dans le sens prévu. La fixation obsessionnelle sur le Front national est une habile méthode pour détourner l’attention.

Tant que ce régime fonctionnera, tel qu’il fonctionne, il sera impossible d’avoir une juste représentation de la France, des Français, de leurs intérêts réels. C’est navrant, car, aujourd’hui, tout serait possible. Il est dans l’air du temps de nouvelles appréhensions de la réalité. La notion d’ « écologie humaine », qu’une nouvelle génération veut promouvoir, indique la voie d’une libération possible ; elle ne peut que déboucher sur une politique naturelle. Le système qui enserre la France relève de vieilleries idéologiques qui ne sont plus adaptées aux nécessités ni même aux volontés du moment. C’est vers ce renouveau que l’étoile doit nous guider.”

La coagulation de la mentalité laïciste anti-catholique par Monseigneur Luigi Negri

Mgr Luigi Negri, archevêque de Ferrare et Comacchio, dénonce le totalitarisme actuel dans un texte traduit par Benoît-et-moi. Extraits :

“Mardi prochain, le Parlement européen votera un projet (le rapport Lunacek) tendant à obliger tous les États membres de l’UE de reconnaître les mariages de même sexe et toute autre forme de couple, ainsi qu’à initier les enfants et les jeunes à une vision de pansexualiste de la réalité sociale. Une vision dans laquelle, de fait, est reconnue aux déviances, même les plus pathologiques, la valeur de droits, personnels et sociaux. C’est un signal sinistre d’une coagulation de la mentalité laïciste anti-catholique – et même, plus précisément, anti-humaine – de manière à ce qu’elle soit imposée sans coup férir, et où la moindre référence dialectique semble être considérée presque comme un crime de lèse majesté. […]

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Par conséquent, pour la responsabilité que j’ai envers la communauté chrétienne – mais au-delà d’elle, envers de nombreuses personnes de bonne volonté que je rencontre dans mon engagement pastoral quotidien – je suis d’accord, avec cordialité et admiration, avec les initiatives que la Manif pour Tous met en œuvre en Europe et en Italie (dimanche 2 Février, il y aura aussi une manifestation à Rome, et bien sûr une à Paris) pour initier au moins une oeuvre de grande sensibilisation à ces affaires à caractère idéologico-social et aux tentatives idéologiques éthiques qui sont faites. […]

Mais au-delà de ce climat de chasse aux sorcières, par lequel, en Europe, on commence à arrêter des citoyens coupables seulement de porter un T-shirt qui porte l’image d’une famille normale, traditionnelle; au-delà de ce climat de pression impositive, ce qui touche sérieusement, et qui surprend, c’est le silence répété de ces réalités institutionnelles qui, à tous les niveaux et dans divers domaines de la vie sociale seraient tenues de prendre une position significativement dialectique contre ce qui est en substance imposé. Ce silence n’empêchera pas l’histoire de le juger comme une faiblesse impardonnable, qui devient collusion de fait et donc responsabilité partagée. Bien différentes ont été les attitudes, en particulier de la part du peuple catholique, qu’on a pu voir dans les moments graves pour la démocratie du pays. […]

Durant ces jours, j’ai pensé amèrement que si les machinations diaboliques des idéologies et des systèmes totalitaires ont été brutalement imposées aux peuples, comme la majeure partie des peuples européens, qui avaient été mûris par des siècles d’une authentique et profonde éducation humaine et chrétienne; que si, malgré cela, les peuples ont subi cette violence, résistant de nombreuses fois dans leur conscience et dans de nombreux autres cas aussi dans l’expression de leur vie culturelle et sociale. Donc, si certains systèmes ont été imposés à l’époque, quelle résistance pourra-t-il y avoir à la dictature qui se prépare ?

C’est une dictature des médias de masse, du politiquement et culturellement correct, qui trouve une tradition catholique ignorée par la majorité des jeunes, ignorée parce que la plupart de ceux qui auraient dû leur en parler ne l’ont pas fait d’une manière appropriée; elle trouve une trame de vie sociale extrêmement faible sur le plan personnel, sur le plan de la conscience humaine, sur le plan de la sensibilisation aux valeurs éthiques fondamentales; en somme, elle trouve un peuple qui se désintègre, qui risque de subir une dictature sans même la noblesse de l’opposition.[…]”

Des instructions de Saint Colomban lues le 22 novembre 2009

Célébration du Transito à l’abbaye de Saint Colomban, Bobbio, Province d’Emilia Romagna

Très chers frères, écoutez attentivement. Ce que je vais vous dire est nécessaire à votre bien. Ce sont des vérités qui apaiseront la soif de votre âme. Je vais vous parler de l’inépuisable source divine. Mais, pour paradoxal que cela paraisse, je vais vous dire: n’étanchez jamais votre soif. Ainsi, vous pourrez continuer à boire à la source de la vie, sans jamais cesser de la désirer. C’est la même source, la fontaine de l’eau vive qui vous appelle à elle et vous dit: Celui qui a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive (Jn 7,37).

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Il faut bien comprendre ce que l’on doit boire, le prophète Jérémie lui-même vous le dit, la source elle-même vous le dit: “Ils m’ont abandonné, moi, source d’eau vive”, dit le Seigneur (Jér 2,13). C’est donc notre Seigneur Lui-même, notre Dieu Jésus Christ, cette source de vie qui nous invite à Lui pour que nous Le buvions. Celui qui L’aime, Le boit. Il Le boit, celui qui se désaltère de la parole de Dieu, celui qui L’aime ardemment d’un vif désir. Il Le boit, celui qui brûle d’amour pour la Sagesse.

Observez bien d’où jaillit cette source, puisque Celui-là même qui est le Pain est aussi la Source, le Fils unique, notre Dieu Jésus Christ dont nous devons avoir toujours avoir faim. Il est vrai qu’en L’aimant, nous le mangeons et en Le désirant nous L’introduisons en nous. Toutefois, nous devons toujours Le désirer comme des affamés. De toute la force de notre amour, nous Le buvons, Lui qui est notre Source, nous y puisons avec toute l’intensité de notre cœur et nous goûtons la douceur de Son Amour.

Le Seigneur, en fait, est doux et exquis: bien que nous Le mangeons et Le buvons, nous devons toutefois en avoir toujours faim et soif, parce que c’est notre nourriture et notre boisson. Personne ne pourra jamais Le manger et Le boire entièrement, parce qu’en Le mangeant et en Le buvant Il ne se tarit pas, ni ne se consume. Notre Pain que voici est éternel, notre Source que voici intarissable, notre Fontaine est douce.

Si tu as soif, bois à la Fontaine de la vie, si tu as faim, mange de ce Pain de vie. Bienheureux ceux qui ont faim de ce pain et soif de cette eau, parce que alors qu’ils en mangent et en boivent toujours, ils désirent en manger et en boire encore. Elle doit être, sans doute, indiciblement délicieuse, la nourriture qu’on mange et la boisson qu’on boit pour ne s’en sentir jamais rassasiés et ennuyés, au contraire, toujours plus satisfaits et avides. C’est pourquoi le prophète dit: “Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur.” (Sal 33,9)

Écoutons, ô frères, l’invitation avec laquelle la Vie même qui est source non seulement d’eau vive, mais aussi de vie éternelle et de lumière, nous appelle à Elle. De Lui, bien sûr, proviennent la Sagesse, la Vie, la Lumière éternelle. L’Auteur de la vie est source de la vie, le Créateur de la lumière, la Source même de la lumière. Ne faisons pas attention aux choses qui nous entourent, mais pointons notre regard vers le haut, vers la source de la lumière, de la vie et de l’eau vive. Faisons comme font les poissons qui émergent de la mer attirés par la source lumineuse. Élevons-nous pour boire à la source d’eau vive qui jaillit pour la vie éternelle (Jn 4,14).

Oh, si Toi, ô Dieu miséricordieux et Seigneur charitable, Tu daignes m’appeler à cette source, parce que, moi aussi, ensemble avec tous ceux qui ont soif de Toi, je puisse boire de l’eau vive qui jaillit de Toi, Source vive! Puisses-tu m’enivrer de Ton indicible douceur sans jamais détacher plus de Toi, juste pour dire: comme elle est douce, la source de l’eau vive, son eau qui jaillit pour la vie éternelle ne manquera jamais!

Ô Seigneur, Toi-même est cette Source, éternellement désirable dont nous devons continuellement nous désaltérer et dont nous aurons toujours soif. Donne-nous toujours, ô Christ Seigneur cette eau pour qu’elle se transforme aussi en nous en source d’eau vive qui jaillit pour la vie éternelle!

Je demande, certes, une grande chose, qui ne le sait pas? Toi seul, ô Roi de la Gloire, Tu sais donner des choses grandes et Tu as promis des choses grandes. Rien n’est plus grand que Toi, mais Tu T’es donné à nous et Tu T’es immolé pour nous.

Pour cela, nous Te prions de nous faire connaître Celui que nous aimons, puisque nous ne cherchons rien à avoir, en dehors de Toi. Tu es tout pour nous: notre vie, notre lumière, notre salut, notre nourriture, notre boisson, notre Dieu. Je Te prie, ô notre Père, d’inspirer nos cœurs du souffle de Ton Esprit et de transpercer de Ton amour nos âmes pour que chacun de nous puisse dire en toute vérité: Fais-moi connaître Celui que mon âme aime (Ct 1,6). Je suis en fait blessé de Ton amour.

Je désire que ces blessures soient imprimées en moi, ô Seigneur. Bienheureuse l’âme transpercée par la charité! Elle cherchera la source, elle en boira. En buvant, elle en aura toujours soif. En se désaltérant, elle désirera ardemment Celui dont elle a toujours soif, tout en continuant à en boire. De cette façon, pour l’âme, l’amour est soif qui cherche avec avidité, il est blessure qui guérit. Dieu et notre Seigneur Jésus Christ, médecin charitable, daigne brûler avec cette blessure salutaire le plus profond de mon âme, Lui qui ensemble avec le Père et le Saint Esprit est un seul Dieu pour les siècles des siècles. Amen.

Au revoir Monsieur Mimoun

On ne peut pas se permettre de l’ignorer!!
Ce Monsieur mérite notre respect et notre admiration.
Il doit intégrer notre devoir de mémoire au titre de citoyen Français exemplaire.
Merci de votre attention.
Mes respects Monsieur MIMOUN.

Au revoir Monsieur Mimoun!
Vous étiez un sacré bonhomme !

BEAU Témoignage

C’est marrant, mais quand je vois la vie d’Alain Mimoun, j’ai comme une envie de comparer. Loin de moi l’idée que tout était mieux avant, mais je dois bien reconnaître qu’à l’occasion, le bon vieux temps me file la nostalgie.
C’est vrai, Mimoun, c’est quand même cet Algérien qui a devancé l’appel sous les drapeaux, pour aller se prendre une dégelée par les Boches en 1940, à la frontière belge. Qui a remis ça contre Rommel en Tunisie. Puis a failli perdre un pied à Monte-Cassino, début 1944, pour débarquer en Provence six mois plus tard. Forcément, quand on n’a pas fait le service militaire parce que Chirac l’a supprimé, on a un peu plus de mal à chanter La Marseillaise avec l’équipe de France. Et je ne veux viser personne.
Mimoun, c’est aussi le garçon de café qui a vécu quatorze ans dans un deux-pièces du XIXe, à Paris, alors qu’il se battait aux quatre coins de la planète pour la suprématie mondiale en course de fond. Celui que Zatopek fut tout heureux de voir gagner à Sydney, en 1956, après l’avoir privé trois fois de podium olympique. Ça a quand même plus de gueule que les petites querelles d’égos de nos divettes footballistiques, à Ferrari de fonction et hôtel particulier dans les beaux quartiers de Londres. Mais je ne veux viser personne…

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Mimoun, c’est le stakhano, vous lançant cette maxime maison pleine de bon sens : « Quand ça fait mal, c’est que ça fait du bien ».
Le gars qui, quand il défaille au 30e kilomètre du marathon de Sydney, se traite de « salaud », s’insulte copieusement, se met lui-même des coups de pied au cul, et gagne par-delà la douleur, quand d’autres préfèrent rejeter la cause de leurs échecs sur les arbitres, les journalistes, les entraîneurs. Ou font la grève de l’entraînement… Bon, d’accord, je vise quelqu’un. Enfin, quelques-uns, mais n’y comptez pas : vous n’aurez pas de noms.
Mimoun, quand il parlait, ça pouvait être imprévisible. On l’écoute :
En Australie, quarante ans après les jeux Olympiques de Melbourne, j’ai été reçu comme un chef d’État. On m’a même proposé le passeport australien. Ce à quoi j’ai répondu : « Vous savez, j’ai déjà deux nationalités : française et corrézienne ».
C’est sûr que ça nous change des analyses d’après match de nos héros modernes, à base de « l’important, ce soir, c’était les trois points », ou « comme dit le coach, il faut prendre les matchs les uns après les autres, on fera les comptes à la fin de la saison ».
Pas de nom, j’ai dit. Une tombe.
Mimoun, c’est le type qui a cinquante stades à son nom, des écoles et des rues dans tous les sens. Pas mal, pour quelqu’un qui vient de mourir. Alors, à quand une école Nicolas Anelka, un stade Samir Nasri, une avenue Karim Benzema ? Aïe, ça y est, j’ai lâché des noms… Las, ceux-là, c’est davantage dans la rubrique fait divers qu’il faut les chercher, accolés à celui de Zahia ou autre…
Mimoun, c’est ce type qui a su aimer la France, au temps où la France savait se faire aimer. Où elle n’avait pas encore pris ce pli de se déverser un tombereau de culpabilité sur la tête à chaque occasion. Mimoun c’est le patriote pur et dur, que même le FLN n’a pas tenté de récupérer, et à qui de Gaulle affirma qu’ils avaient deux points communs : leur amour de la France et leur longévité. Car oui, Mimoun, à 44 ans, il gagnait son quatrième titre de champion de France du marathon ! Jusqu’au bout, il aura couru ses 10 ou 15 kilomètres par jour.
Mimoun, c’est ce petit Français qui meurt en même temps que Mandela et qui, comme lui, a su jeter des ponts entre les cultures et les races, pour devenir l’un des plus grands porte-étendards français.

Cet homme qui est né Ali, musulman, dans l’Oranais, et qui est mort 92 ans plus tard Alain, catholique, dans le Val-de-Marne. Qui admirait Bayard et Sainte-Thérèse-de-Lisieux ― la France du panache et celle de la petite voie. Et qui déclarait, se retournant au crépuscule de sa vie sur son aurore :

Je savais depuis longtemps que mon pays était de l’autre côté de la mer. Mes ancêtres, c’était les Gaulois. La France était déjà dans ma peau et dans mes veines. Par conséquent, qu’on ne me parle pas de ces conneries d’intégration !

Alain Mimou est né le 1er janvier 1921 à Maïder en Algérie française et mort le 27 juin 2013